L'art d'être grand-parent
La nouvelle donne relationnelle
Tous les spécialistes de l’enfance s’accordent pour le dire : les grands-parents sont indispensables à l’équilibre des petits-enfants. Plus patients et plus disponibles, les grands-parents consacrent souvent le temps passé avec leurs petits-enfants à faire des activités exclues du planning surbooké des jeunes parents : cuisiner, jardiner, faire des activités manuelles. Déchargés du rôle d’éducateur, les grands-parents sont aussi plus à l’écoute des soucis quotidiens des petits et la confiance s’installant au fil des années, ils peuvent même avoir à jouer un rôle de médiateur en cas de crise familiale. De plus, quand les parents divorcent, les grands-parents deviennent quelquefois le seul repère stable pour leurs petits-enfants dans le cyclone familial. Enfin, le rôle des anciens sera toujours de transmettre la mémoire du passé, des racines, une lignée, une histoire aux générations de demain. Pourtant, la majorité des appels que reçoit le service d’écoute de l’école des grands-parents européens concerne les plaintes de grands-parents qui ne voient plus leurs petits-enfants.
Les données relationnelles ont beaucoup changé
Tout a été bouleversé dans les valeurs et le fonctionnement des familles ces dernières décennies. Les nouvelles générations ressentent moins de dépendance vis-à-vis de leur famille d’origine. C’est la qualité de la relation qui fera vivre l’esprit familial. Dès que l’affectif se distend, le lien vole en éclats. Les maladresses relationnelles ne sont plus acceptées. Chacun doit déployer des trésors de diplomatie, d’écoute et de respect de l’autre pour que la relation perdure. Cela explique la multiplication des divorces et des brouilles familiales. Les familles d’aujourd’hui, bien qu’ayant une généalogie officielle, fonctionnent sur une généalogie officieuse faite d’affinités et de climats relationnels positifs. Services, affection, indépendance pourraient être les trois mots clés pour définir les nouvelles donnes relationnelles. Et cela ira jusqu’au refus de l’aide si celle-ci menace l’indépendance.
Les grands-parents doivent devenir de hauts diplomates
Pour voir régulièrement leurs petits-enfants, les grands-parents d’aujourd’hui doivent devenir très attentifs à leurs attitudes et à leurs paroles avec les jeunes parents. Or, on n’apprend malheureusement pas à se gêner et à se censurer avec ceux que l’on aime. Souvent, d’ailleurs on ménage plus les personnes étrangères que ses proches.
Bref, nous avons davantage appris à malmener ceux que nous aimons qu’à leur offrir une courtoisie et un respect que nous prenons pour de la froideur et un manque de spontanéité. Mais c’est une erreur. Nos relations familiales et conjugales se porteraient bien mieux si nous y apportions le tact que nous savons déployer à l’extérieur. Et puis rappelez-vous qu’aux côtés de votre enfant chéri, il y a justement ce tiers étranger qui attend de vous cette nouvelle distance. Avant de devenir des grands-parents, vous êtes surtout devenus des « beaux-parents ».
Le terrain est miné dès le test de grossesse
C’est dès le test de grossesse de la jeune maman que vous allez, vous, passer votre premier test de grands-parents. Pour réussir ce premier oral, il va falloir montrer un bonheur et un enthousiasme à la hauteur de celui des jeunes parents, certes, mais tout en démontrant que vous avez bien compris que cet enfant n’est pas le vôtre et que vous n’êtes concernés qu’au deuxième degré. C’est déjà subtil. A chaque conversation sur la grossesse ou l’accouchement vous devrez à la fois être rassurants : tout est normal, les brûlures d’estomac, les crampes… mais ne jamais minimiser ce que vit votre fille ou belle-fille. Exit donc toute phrase du genre : « De mon temps, on ne s’écoutait pas à ce point-là. » ou « Vous faites bien des histoires pour pas grand-chose. » On ne vous le pardonnerait pas de sitôt.
Ne postillonnez pas sur le berceau
Le bébé vient de naître ? Là encore, vous voici confrontés à un exercice de tact sur lequel va se jouer tout le capital de confiance de la jeune accouchée. Extasiez-vous sur cette pure merveille, mais pas trop près du berceau. Surtout montrez votre envie de prendre le tendre angelot dans vos bras mais attendez la permission de la maman.
Enfin, sachez éviter les deux derniers écueils :
- Le jeu des ressemblances. Il est unique au monde. Le comparer, c’est le minimiser.
- Et les adjectifs possessifs. Ne l’appelez surtout pas « MON bébé » ou « MON petit chat ».
Encore dix-huit mois de mise à l'épreuve
Pendant les dix-huit premiers mois, abstenez-vous de tout conseil et de toute critique. Les jeunes parents sont trop peu sûrs d’eux pour le prendre avec recul et philosophie. Vous allez les blesser ou les exaspérer. Seule attitude possible, admirer leurs talents de parents, les réconforter quand c’est dur en leur disant qu’ils font vraiment de leur mieux et prendre un air intéressé voire passionné quand ils exposent les nouveaux principes de puériculture : « Ah bon, il ne faut plus chauffer les biberons ? Ah, c’est bien. » Respectez toutes leurs consignes, même celles qui vous paraissent les plus absurdes, s’ils vous laissent le petit chéri d’amour à garder. « Oui, oui, je lui mettrai bien ton T-shirt dans le lit pour qu’il ait l’odeur de sa maman en s’endormant. » Et no comment !
Le passage obligé par les jeunes parents
Mais surtout, n’ayez jamais aucune initiative personnelle. Que ce soit pour l’achat d’une peluche (ma belle-fille est contre à cause des acariens), comme pour lui ouvrir un Compte Epargne (il en a déjà un des autres grands-parents), demandez toujours l’avis des parents avant d’agir. L’objectif est qu’au fil des années, les jeunes parents acquièrent la certitude que vous ne vous positionnez pas en compétition avec eux pour accaparer l’amour de leurs enfants ou pour obtenir le titre de « meilleurs parents ». Bons ou mauvais, ce sont eux les parents et vous devez leur montrer que vous le savez depuis le départ. Dès que vos enfants seront rassurés à votre égard, ils vous laisseront volontiers prendre votre place de grand-parent.
D’ici là, bon courage ! Et tenez bon car ça en vaut la peine.
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SUGNY Françoise (mardi, 09 avril 2024 15:00)
Bonjour,
Je souhaiterai un rendez-vous avec Christel Petit Collin