C’est de la rencontre de deux personnes qui s’aiment et de leur décision commune de vivre ensemble, puis d’avoir des enfants que naît une nouvelle cellule familiale. Au cours des années, cette famille toute neuve va grandir, évoluer et traverser des crises qui mettront périodiquement en péril sa cohésion. Le divorce, les brouilles familiales, les difficultés avec l’un des membres sont les principaux écueils qui la guettent. Pour la plupart des gens, la famille est une valeur sûre, une valeur-refuge mais tout en rêvant d’une famille tendre et unie, bon nombre d’entre eux vivent des tensions, des clashes et beaucoup de frustration. Voici des pistes à explorer pour passer du rêve à la réalité.

Revenons à notre jeune couple. Il est très amoureux et sûr que cet amour va durer toute la vie. Personne le lui a appris qu’il fallait entretenir la relation pour que cet amour reste fort et vivant. Et pourtant ! Pour maintenir un lien conjugal solide, il faut beaucoup de vigilance. Voici les principaux ingrédients pour nourrir le lien : une sexualité épanouie, certes, mais aussi une grande tendresse composée de petites attentions, de gestes de réconfort et de mots d’amour. La relation doit également comporter de la solidarité, de l’entraide et de l’amitié, c’est-à-dire un mélange de respect, d’estime, de tolérance et de complicité. Ajoutez-y beaucoup d’humour mais pas une once de moquerie. Enfin le couple doit communiquer : le manque de communication est la cause première des séparations.

Construire et entretenir un lien conjugal solide et de bonne qualité nécessite beaucoup d’énergie. De plus, le jeune couple ne vit pas tout seul. D’après Milton Erickson, le grand thérapeute américain, le drame de l’être humain est d’avoir une belle mère. Dans aucune autre espèce vivante, les ascendants gardent un tel… ascendant justement, sur leur progéniture devenue adulte. Aucune mère ourse n’ira expliquer à sa fille ourse comment elle doit s’occuper de ses oursons, ni même les lui garder d’ailleurs. Certains parents, mal sevrés de leurs enfants, peuvent avoir un impact très négatif sur la vie du jeune couple. Toute la difficulté est de trouver l’équilibre qui consiste à prendre ses distances sans couper les ponts, à instaurer le respect de l’intimité du jeune couple, des règles de relations d’adulte à adulte. Ne laissez plus l’avis de vos parents avoir un impact (positif ou négatif) sur vos décisions.

Jacques Salomé dit avec humour que la maturité consiste à pouvoir faire quelque chose même si Maman est d’accord.

La naissance d’un enfant peut renforcer un couple comme elle peut précipiter sa séparation. Les raisons pour lesquelles on s’était choisis au départ sont modifiées par la venue de l’enfant. Cette femme qui avait choisi un mari peu affirmé pour pouvoir le commander va se sentir brusquement vulnérable de ne pas le sentir fort et protecteur à la venue de l’enfant. Cet homme qui avait choisi une compagne si maternelle va être frustré de se faire voler toute cette attention maternante par son enfant… Ces deux-là s’étaient choisis pour leur amour des activités de montagne et leur dynamisme sportif. Quel équilibre vont-ils mettre en place pour concilier la venue de l’enfant à leur vie sportive ? Bref, le couple va devoir réviser et ajuster ses raisons d’être ensemble. Les jeunes parents vont également devoir accorder leurs violons en matière d’éducation. Il leur faut se coordonner sur les limites à poser, le code moral à transmettre, les notions d’ordre, d’hygiène, de civilité, de devoir, de responsabilité et accorder à l’autre sa légitimité à agir à son idée avec notre enfant. Il faut donc créer, ajuster et consolider un couple parental face à l’enfant par un dialogue permanent de parent à parent. Mais ce couple parental doit fonctionner en parallèle du couple conjugal et en aucun cas s’y substituer.

Le couple parental naissant va très vite être confronté à la nécessité de se repositionner à nouveau face aux beaux-parents devenus des grands parents et dont l’enthousiasme est quelquefois maladroit et envahissant. Pour retrouver la bonne distance, l’idéal est de nouer avec les grands parents un dialogue constructif et d’établir des consignes par rapport aux petits-enfants. En fait, les grands parents sont bien à leur place de grands parents s’ils respectent les consignes de leurs enfants pour s’occuper de leurs petits-enfants. Mais s’ils critiquent les façons de faire des jeunes parents, s’ils s’interposent en sauveur de petits-enfants quand les parents grondent, s’ils donnent des bonbons ou des biscuits avant les repas…. c’est vraiment un sabotage de l’autorité parentale.

 Enfin, dans cette famille grandissante, vient s’instaurer une frontière naturelle et magique pour délimiter le monde de l’enfance et le monde des adultes. Avant Mai 68, c’était une évidence. La frontière était très marquée. Les enfants ne parlaient pas à table, allaient se coucher quand les parents veillaient, ne se mêlaient pas aux conversations d’adultes, ne discutaient pas les décisions des adultes et avaient tout loisir de vivre dans cette bulle magique de jeu et d’insouciance (entre deux taloches !). Evidemment, ça a bien changé en cinquante ans et si le passage objectif de l’enfance à l’âge adulte se fait de plus en plus tard, les enfants sont traités en mini adultes de plus en plus tôt. Ils se mêlent aux conversations des grands, coupent la parole, participent aux prises de décision quand ils n’imposent pas carrément les leurs…Or, la plupart des dysfonctionnements familiaux proviennent justement du non-respect de cette frontière entre le monde de l’enfance et le monde des adultes par un ou plusieurs membres de la famille. Le mauvais positionnement d’un membre de la famille par rapport à cette frontière engendre beaucoup de souffrance pour tout le système familial. Cela peut être un parent infantile, un enfant adultifié ou pire parentifié comme le refus d’un grand parent d’admettre le statut d’adulte de son enfant etc.

Ainsi, si vous avez l’impression que votre famille dysfonctionne, c’est que quelqu’un n’est pas à sa place ou ne joue pas son rôle. Vous l’avez compris, la structure de base de la famille, ce couple conjugal et parental a intérêt à être sacrément solide pour faire face à toutes les difficultés extérieures. Ses armes ? Dialogue, communication, concertation, collaboration… Comme d’habitude…Et pour que la famille fonctionne bien, c’est à la fois très simple : Il suffit que chacun soit bien à sa place. Et c’est aussi ce qu’il y a de plus compliqué à réaliser.